BXL - 1/3 - Abolir les distances
Des mois que je préparais ce voyage.
J'avais ce besoin
urgent de sortir de ma monotonie quotidienne, de prendre des vacances.
Tout seul.
Correspondante belge.
Vivait du mieux qu'elle
pouvait sans être vraiment indépendante.
Condamnée à galérer pendant
quelques années encore. Le lot de quasi toutes les étudiantes bruxelloises.
Une situation dont je me rappelle comme si c'était
hier, même si je n'ai pas souhaité poursuivre mes études de psychologie à l'université.
Elle rêvait de
rencontrer le prince charmant.
Ses critères étaient un homme légèrement plus âgé qu'elle, avec une voiture, un bon
travail, responsable, un physique attrayant. Tout ce que je
n'avais pas.
En revanche, je n'avais pas non plus cette arrogance
de ces sosies de Brad Pitt qui n'ont qu'à tendre le bras pour récolter des numéros de
téléphone.
Lorsque j'y repense, je me rends compte à quel point nous étions
complémentaires... quand venait le moment de manger, nous redoutions la
réaction, les jugements de l'autre.
Chaque détail était sujet
d'analyses, chaque question soulevée devait trouver une réponse.
Avec
elle, les débats incessants pour avoir le dernier mot étaient de mise.
Nous pouvions nous parler des heures, même si, après plusieurs mois à
nous raconter notre quotidien, nous
avions toujours de l'appréhension, de la timidité l'un pour l'autre.
Je
crois que nous avions tout simplement peur tout autant l'un que l'autre
d'être déçus. Que nos rêves se brisent en mille morceaux.
Nous
recherchions la perfection, quête illusoire évidemment. Nous
étions obsédés par l'idée de nous en rapprocher le plus possible.
Le car étant la solution la plus abordable, je n'avais pas d'autre
choix que d'arriver le vendredi matin.
La fête avait lieu le samedi
soir.
J'avais prévu de loger dans une auberge de jeunesse avec des
amis.
Mais elle insista tellement pour m'héberger, prétexta que
j'économiserais de l'argent,
qu'elle pourrait me loger sur un canapé du salon, que sa colocataire
n'y voyait pas d'inconvénient non plus...
J'ai fini par accepter. Après tout, l'entraide entre étudiants, ca me
paraissait normal...
Je suis dans la gare du nord de Bruxelles. Mes yeux scrutent nerveusement chaque jeune fille aux cheveux chatains foncés, mais je ne sais pas où elle est. Je sors mon portable :
"Où es-tu ? Viens me rejoindre je suis devant le panneau des heures de départ..."
"Non viens toi, je suis devant l'entrée..."
A ce petit jeu, elle était aussi maligne que moi.
En effet, ne
jamais aller à la rencontre de l'autre permet de rester bien caché.
De
l'observer de loin.
Vous avez dit voyeuse ? :)
Ne la trouvant toujours pas je dus la rappeler.
Elle se leva et me fit de grands signes.
Alors le virtuel se confondit avec le réel.
Alors mes yeux croisèrent les siens pour la première fois...